Mercredi, c'est permis ! Thierry Beaurepère est de retour pour vous faire part de son humeur du moment. Et revient sur sa participation aux Lauréats de la Mer 2019 de Costa Croisières et l'état (pas si bon) du marché de la croisière. Embarquement immédiat.
Le week-end dernier, le choix était cornélien… La perruque de Bilal Hassani ou le nœud papillon de George Azouze, le président de Costa France ? Le trophée en forme de micro ou celui figurant un dauphin ? Tel Aviv ou Barcelone ? Madonna ou Penelope Cruz ? En clair, l’Eurovision ou les Lauréats de la Mer de Costa ? Mon engagement professionnel (sic !), et surtout ma rédactrice en chef, ne m’ont guère laissé le choix et j’ai — finalement — pris la mer, avec les meilleurs vendeurs de la compagnie de croisières.
A vrai dire, à bord du Costa Favolosa, le public n’avait pas grand-chose à envier à celui du concours de la chanson (pardon, il faut dire Song Contest, c’est plus tendance !). Et lors de la chaude soirée Extravaganza qui clôturait les Lauréats, certains looks auraient pu trouver une juste place parmi le public du Convention Center d’Israël. Mention spéciale à nos amies anglaises, toujours prêtes à sortir des placards leurs robes pailletées ou léopard, sans craindre le ridicule.
Sur le bateau, Penelope Cruz aurait pu faire encore grimper la température. Mais l’égérie de Costa a préféré monter les marches du festival de Cannes au bras d’Antonio Banderas. Plus glamour ! Pourtant, Neil Palomba, le jeune patron de la compagnie de croisières à la barbe naissante et la chevelure grisonnante, n’a rien à envier au ténébreux acteur espagnol…
(Seulement) 520 000 croisiéristes français en 2018
Mais revenons à nos moutons (ou plutôt nos dauphins), comprenez le bilan du marché de la croisière en France au cœur des discussions (parce qu’on a aussi travaillé à bord !). Et là, il faut bien constater que la mer est plutôt calme. Avec 520 000 croisiéristes en 2018, la France a raté le bateau (neuvième marché mondial), en particulier comparé à nos voisins allemands, anglais ou italiens qui ont su profiter de l’explosion de l’offre : 404 bateaux en 2019 contre 294 dix ans plus tôt. Même les Espagnols nous sont passés devant ! Ce n’est pourtant pas faute de faire de la pub. Costa investit des millions d’euros en publicité, comme aucun autre acteur du tourisme ; et ses spots occupent les écrans de télé français 40 semaines par an, un record… Peut-être faut-il demander à Sophie Marceau ou Carole Bouquet de s’habiller en sirène pour faire enfin décoller les ventes en France ?
Les agences présentes à bord du Costa Favolosa étaient légitimement convaincues par le potentiel des voyages en mer. Mais un test anonyme réalisé il y a quelques semaines m’a permis de mesurer l’ampleur du chemin qu’il reste à parcourir. A ma requête pour un voyage en famille durant l’été, aucun vendeur ne m’a proposé spontanément une croisière. Pendant que les acteurs du Net — Cruiseline ou AB Cruise — profitent des vents porteurs, trop de distributeurs restent à quai.
Il n’est pas encore trop tard. Les prévisions tablent sur 680 000 croisiéristes français en 2021 (environ 10% de croissance par an) et Costa espère 47% de parts de marché. D’ici à 2027, on attend la livraison d’une centaine de paquebots, plus propres et respectueux de l’environnement pour répondre aux critiques, parfois légitimes. Aux agences de saisir cette nouvelle (dernière ?) opportunité avant que les compagnies, exténuées par tant d’investissements commerciaux pour des résultats décevants, finissent par privilégier la vente directe…