Les 15 ans du croisiériste, marqués par des points de bascule comme les évolutions des technologies, la montée en puissance des compagnies aériennes, la consommation effrénée de produit touristique et des parcs d’attractions arbitrés par l’apparition du tourisme durable
Incontestablement, CroisiEurope en 15 ans peut se targuer d’avoir réinventé les fleuves en France, en Europe et dans le monde, comme l’atteste l’augmentation de la flotte passant de 25 à plus de 50 bateaux, doublant ainsi nombre de passagers.
Au fil de l’eau et des années, le croisiériste se plaît à mettre en avant sa passion du tourisme qu’il revendique au nom de son positionnement d’origine : celui de pionnier pour l’aventure fluviale.
Interview Eric Collange Directeur Commercial de CroisiEurope
Tour Hebdo : Vous évoquez votre positionnement de pionnier. Pourquoi ?
Eric Collange: par nos offres tout simplement. Prenez la gironde mise en avant par Cyrano de Bergerac : nous fûmes les premiers à naviguer sur ce fleuve. Quelques années plus tard, la Loire allait être proposée aussi. Idée un peu folle au départ sur ce fleuve réputé innavigable et pourtant, à force de persévérance, nous sommes les premiers à jamais à être sur le fleuve royal. Pionnier dans l’innovation, portée par nos Bateaux avec des roues à aubes*, construits tout comme certains grands paquebots émérites de l’époque au chantier SNX de saint Nazaire.
Tour Hebdo : Ce modèle de roue à aubes, c’est un peu votre marque de fabrique
Eric Collange : Ça marque notre côté pionnier. D’ailleurs, c’est ce qui nous a permis d’être amarrés au cœur de Prague et de lancer la bohème romantique. Cette originalité a fonctionné à plein et nos clients nous ont suivis. Ils affichent une certaine fierté quand ils montent à bord de ce bateau qui s’apparente à un Relais & Châteaux sur un fleuve.
lrei aussi les croisières 2023
Tour Hebdo : Relais & Châteaux ! la comparaison n’est-elle pas un peu trop exagérée ?
Eric Collange : Les Français sont avides de confort comme tous les touristes du monde entier. Vous voyez bien que les palaces sont en augmentation. Les séjours de luxe explosent. CroisiEurope suit le mouvement en montant en gamme avec ses bateaux 5 ancres. Ils sont plus modernes, avec des cabines épurées et repensées. Le lit tourné vers le fleuve est une véritable révolution.
Tour Hebdo : Montée en gamme et en prix ! vous ne craignez pas vous couper de votre clientèle de base ?
Eric Collange : Non, car le virage se fait de manière progressive en laissant également des bateaux 4 ancres afin que nos croisières restent accessibles au plus grand nombre. À ce sujet, je rappelle que le supplément sigle est encore gratuit sur nos croisières de Noël. Aujourd’hui la moitié de notre flotte est passée en cinq ancres. Le succès est au rendez-vous et nos clients sont ravis d’avoir deux niveaux tarifaires.
Tour Hebdo : Que répondez-vous au bashing ambiant concernant l’impact environnemental du tourisme ?
Eric Collange : Que nous n’avons pas attendu cette vague verte pour être prêts. À quai nous sommes à l’électrique. A bord, nous traitons nos eaux usées. Pour nos bateaux nous utilisons des peintures non polluantes. Nos moteurs fonctionnent au GTL, le carburant le plus écoresponsable du moment. Nous avons mis fin aux bouteilles en plastique à bord et économisé 30 tonnes. Vous voyez, nous ne restons pas inactifs dans ce domaine.
Tour Hebdo : Vous parliez en préambule d’évolution. Quelle incidence pour vos offres ?
Eric Collange : Je cite en premier la montée en puissance des compagnies aériennes. Elle nous a permis d’étendre notre terrain de jeu avec le Mékong au Vietnam, au Cambodge avec les temples d’Angkor et la découverte de Tonle Sap. En 2019 nous étions devenues un des premiers opérateurs sur ces destinations. Cinq bateaux nous appartiennent et sont tous à taille humaine de 15 à 28 cabines.
Tour Hebdo : Mais Tonle Sap, c’est un lac !
Eric Collange : On parle aussi de lac chez CroisiEurope. A ma plus grande joie nous sommes devenus non seulement des pionniers, mais des explorateurs. L’Afrique australe est arrivée presque comme une évidence. Une idée venue du bout du monde : mettre un bateau sur le lac Kariba au Zimbabwe.
Tour Hebdo : Vous pouvez développer ?
Eric Collange : Ce lac au milieu de nulle part, est un safari croisière sur les traces de Mandela, du Botswana, de la Namibie. Une merveille de nature avec les emblématiques chute Victoria. Moi-même arrivant chez CrosiEurope il y a douze ans, je n’aurais imaginé vivre une telle aventure aux confins du monde. Le luxe est présent, mais pas ostentatoire. L’aventure c’est aussi prendre des risques comme avec des lodges d’exceptions 80 mètres carrés, dotés de piscine privative. Le navigateur pose le pied-à-terre pour une rencontre fabuleuse entre les safaris nautique et terrestre.
Tour Hebdo : Des nouveautés ?
Eric Collange : Un deuxième bateau maritime de 130 personnes, haut de gamme. Il était destiné au Canada, puis aux Antilles françaises. Finalement après décision de notre ami covid, il a été aux Canaries et en corse en été !
Tour Hebdo : Ça marche ?
Eric Collange : Oui, car notre concept nous assure à chaque fois la réussite de nos offres. Nous avons été les premiers à mettre un tout inclus en croisières. Le tout inclus ne dénature le pays que nous explorons, car nous continuons à proposer des repas en extérieur pour découvrir les joies culinaires de chaque région. C’est ce que nous avons appliqué avec la Corse. Le pari est gagné. Cette île, la plus belle de la méditerranée, nous a permis de faire découvrir la destination autrement.
Tour Hebdo : Que retenez-vous de ces évolutions depuis 15 ans ?
Eric Collange : Le monde évolue. Le tourisme évolue, certes. Mais des constances demeurent comme le patrimoine, la nature, l’histoire. Si aujourd’hui, notre époque à la recherche de sens promulgue le retour aux sources, la mise en valeur des patrimoines architecturaux s’imposait dès notre création de CrosiEurope. D’ailleurs, Stephane Bern en parfait ambassadeur de cette richesse historique sera présent sur certaines de nos croisières cette année. ‘’La taille humaine’’ fait son entrée dans le vocabulaire du monde entier pour proposer autre chose que du tourisme de masse. Mais chez nous, avec nos bateaux de petite taille, nous avons toujours répondu à ces aspirations. Pour moi, l’évolution se présente comme un mélange d’innovation et d’adaptation. D’ancien et de moderne. Des bateaux en bois exotique, mais propulsé au GPL…le monde évolue tout en s’adaptant.
Tour Hebdo : Pour conclure ?
Eric Collange : Je terminerai par un dernier élan sur les canaux de France pour découvrir notre patrimoine de l’intérieur. Péniche haut de gamme avec Jacuzzi et vélo a bord pour être dans l’ère du temps avec le slow tourisme. Enfin, ne pas oublier nos croisières à thèmes. La aussi nous avons été pionnier avec le musical, la gastronomique, la randonnée et maintenant le bien être, toujours pour être dans l’ère temps.
*un bateau à roues à aubes est un type de bateau qui utilise une ou plusieurs roues à aubes pour sa propulsion