L'Union européenne entend redéfinir les modalités de la directive EU261/2004, encadrant les compensations versées en cas de retard ou d'annulation de vols. Les compagnies aériennes seraient les grandes gagnantes, au détriment des consommateurs.
L'information passe quasiment inaperçue. Pourtant, elle risque de changer la donne pour les 900 millions de passagers aériens européens. Selon deux associations de consommateurs, la Fédération des organisations de consommateurs allemandes et l'APRA (Association of Passenger Rights Advocates), qui ont été les premières à tirer la sonnette d'alarme, l'Union européenne souhaite revoir les règles de la directive EU261/2004 relative aux droits des passagers aériens.
Ce règlement encadre les compensations versées par les compagnies aériennes en cas de retard ou d'annulation d'un vol. La directive prévoit aujourd'hui une indemnité forfaitaire pouvant aller de 250€ à 600€, en fonction de la distance parcourue, en cas de retard de plus de 3 heures à l'arrivée à la destination finale. A l'initiative de la présidence croate, l'Union européenne entend désormais assouplir ces conditions, en faveur des compagnies aériennes. Le 30 janvier dernier, la présidence croate a transmis aux délégations nationales ses "principes directeurs visant à guider les discussions à venir", en toute discrétion. Le texte devrait être officiellement présenté en juin.
Vers un durcissement des règles de remboursement ?
En pratique, les passagers ne seraient plus indemnisés en cas de retard de plus de 3 heures mais uniquement si ce retard dépasse 5 heures pour les vols de plus de 3 500 kilomètres. Pour les vols couvrant une distance jusqu'à 6 000 kilomètres, le droit à l'indemnisation pourrait être ouvert uniquement à partir d'un retard de 9 heures. Et, au-delà, le seuil du retard serait porté à 12 heures. De quoi réduire considérablement le nombre de cas à indemniser. Une modification qui n'a rien d'anodine alors que près de 16,5 millions de passagers de l'UE ont subi un retard de leur vol en 2018, selon une étude de la Commission européenne.
En l'absence de tapage médiatique, les associations de consommateurs tentent de mobiliser les consommateurs. Les sites spécialisés dans l'indemnisation des passagers montent eux aussi au créneau, à l'image d'AirHelp, qui risque de voir s'envoler l'essentiel de son chiffre d'affaires. "Selon nos calculs, près de 80% des passagers pourraient perdre leurs droits !", explique Agnès Andes, Senior Social Advertising Manager chez AirHelp. "En France, rien qu’en 2019, 776 000 passagers ont subi des annulations de vols", ajoute-t-elle. Le bras de fer entre compagnies aériennes et consommateurs est lancé.