Mariot Voyages, ces gens du Nord !

« Si j’évolue dans les transports, c’est tout simplement parce que ma grand-mère a divorcé », lâche tout de go Yves Mariot, l’emblématique dirigeant de Mariot Voyages. Quand l’histoire d’une entreprise est intrinsèquement liée à celle d’une famille, l’exemple de cet autocariste du département du Nord se place là. Petit coup d’œil dans le rétroviseur. Fernande, la grand-mère maternelle d’Yves Mariot, épouse en secondes noces Germain Gamelin, un boucher à la retraite. En 1932, ce dernier achète un car et propose quelques excursions aux habitants des communes situées autour de La Bassée, où il est installé. Sept ans plus tard, il est déjà à la tête – pour ne pas dire au volant – de deux autres véhicules lorsque la Seconde Guerre mondiale éclate et freine brutalement son ascension. Tandis que ses bus sont réquisitionnés, il est contraint avec son épouse de se réfugier à Pau comme de nombreux autres nordistes. 

Une reconstruction après-guerre

« En 1947, alors qu’ils viennent de rentrer à La Bassée, mes grands-parents décident de s’associer à Robert Mullie, l’un de leurs proches, dans le but de relancer leur entreprise qu’ils nomment Gamelin-Mullie », explique Yves Mariot en pointant que ladite année est également marquée par un autre événement majeur. « Alors que j’habite en l'Eure-et-Loir avec mes parents et mon frère aîné Gérard, je viens passer un moment chez mes grands-parents », raconte celui qui n’a alors que trois ans. « Je devais être un gentil garçon car au lieu de me renvoyer chez moi, Fernande et Germain ont proposé à mes parents qu’ils viennent s’installer auprès d’eux… Ce qu’ils ont fait ».

Tous les ingrédients semblent dès lors réunis pour que la vie personnelle et professionnelle des uns et des autres se déroule calmement, mais le destin va en décider autrement ! Le patriarche des Gamelin décède en 1949. Et quelques temps plus tard, Robert Mullie, qui disposait des contacts commerciaux de l’entreprise, jette l’éponge en 1952.

Après avoir été dirigée un temps par Fernande Gamelin elle-même, l’entreprise est finalement entièrement reprise par les parents d’Yves Mariot au cours des années 1950. « Georges, mon père qui était commis-boucher de son état, est alors devenu conducteur de car », se souvient-il. Au programme de ses déplacements : essentiellement des excursions et le transport d’ouvriers sur leur lieu de travail. Afin de développer la compagnie Mariot Gamelin – durant un court moment dénommée Gamelin-Mariot –, un premier salarié extérieur à la famille est embauché en 1962. « Ce mécanicien a demandé à mes parents s’ils allaient lui faire des fiches de paie. C’est moi qui m’en suis chargé et c’est comme ça que j’ai commencé, moi aussi, à travailler dans l’entreprise », se souvient Yves Mariot. Obligé dans la foulée à effectuer son service militaire, ce dernier parvient néanmoins, grâce à une affectation à Arras (au sein d’un peloton transport, cela ne s’invente pas !), à rentrer deux jours par semaine pour s’occuper de l’affaire familiale.

Trois entités distinctes

Après dix-huit mois, libéré de ses obligations sous les drapeaux, Yves Mariot reprend le chemin de La Bassée sans même envisager de partir vers d’autres horizons. « A l’époque, nous n’étions que quatre dans l’entreprise : mon père, mon frère Gérard, notre mécanicien et moi. Je peux le dire maintenant, mon frère et moi roulions sans avoir l’agrément transport en commun. Je me suis fait arrêter une fois. Heureusement, j’avais une bonne avocate qui a réussi à plaider que j’avais dû remplacer d’urgence un conducteur… » Se laissant aller encore à plus de confidences, Yves Mariot concède même qu’il ne s’est déclaré qu’en 1966. « C’était vraiment une autre époque », relève celui qui, aujourd’hui, s’active à employer dans les règles quelque 265 collaborateurs au sein de trois entités distinctes regroupées sous l’entité juridique Mariot Gamelin Autocars.

La première desdites sociétés, en l’occurrence Mariot Gamelin, encadre le transport de voyageurs en autocar et en bus. La deuxième, TLV (Transporter La Vie), est spécialisée dans la mobilité des personnes en situation de handicap (150 000 transports par an contre 36 000 lors de son lancement en 1996). Voyages Mariot, la dernière structure, propose quant à elle un large panel de voyages et d’excursions en France comme à l’étranger, et ce aussi bien en autocar qu’en train, en avion et en bateau. « L’idée de créer cette agence en 1985 m’est venue après la rencontre d’une personne qui travaillait dans le voyage », précise Yves Mariot. « Nous avons débuté comme associés mais, finalement, elle a décidé de se retirer. Comme je suis quelqu’un de déterminé et que je n’aime pas arrêter les choses, j’ai continué seul… » Désormais, l’agence accueille ses clients dans cinq points de vente (membres du réseau Selectour) et s’apprête à lancer une boutique en ligne développée en interne. Elle pourrait être opérationnelle dès ce mois de juillet.

La défense des PME

« Le tourisme et le transport occasionnel recouvrent, aujourd’hui, 65 % de nos activités, tandis que le reste concerne des services réguliers », poursuit Yves Mariot en soulignant ne desservir des lignes régulières que depuis l’an 2000. Le motif de ce virage : le découpage en quatre périmètres du réseau des transports interurbains géré par le conseil départemental du Nord. Mariot Gamelin est depuis le mandataire d’un groupement solidaire de vingt-et-une entreprises (207 autocars) en charge d’une zone baptisée l’"Arc-en-ciel 2". Celle-ci s’étend sur une dizaine de cantons, dont ceux d’Armentières, Pont-à-Marcq et Seclin Sud.

Précision : en dix-huit ans, la gestion de ces périmètres a déjà été encadrée par deux délégations de service public concernant au total 50 transporteurs. « Ces DSP ont permis le maintien de beaucoup de nos PME », se félicite Yves Mariot. Et pour cause ! En tant qu’ancien président de la FNTV Nord de 1992 à 2008, il a personnellement œuvré pour la concrétisation de ces délégations tout comme il s’est impliqué dans d’autres dossiers au sein du réseau de PME indépendantes Réunir, dont il est membre depuis sa fondation en 1998. « Je suis passionné par les transports », glisse-t-il pour expliquer ses engagements.  « C’est comme ça. J’aime mon secteur d’activités, le service au public et le travail avec mes collaborateurs. Si mon entreprise va bien, je vais bien », insiste celui qui lors des rares interviews réalisés insiste sur son leitmotiv : "Privilégier l’humain et l’investissement avant le profit ». Il est peu de dire que cet entrepreneur invétéré, ce travailleur dans l’âme est à la fois au four et au moulin, au bureau et au garage. « Même si, jusqu’à son décès en 2012, mon frère Gérard s’est davantage chargé de la partie conduite et matériels, en plus de m’occuper de l’administratif et de la gestion, j’ai toujours cherché à tout faire dans notre PME familiale, à tout connaître. Par exemple, j’ai ainsi conduit des autocars jusqu’en 2006, date à laquelle ma FCO (attestation de Formation Continue Obligatoire – NDLR) a expiré. Comme cela me manque, je l’ai repassée récemment afin de pouvoir encore reconduire de temps en temps… »

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La galaxie « GamelinMariot » en chiffres

- 265 collaborateurs dans les trois structures, dont 180 conducteurs affichant une ancienneté moyenne de 9 ans.  

- 39 cars de tourisme, dont cinq à double-étage de 85 à 94 places ; 8 véhicules de 8 à 19 places ; 27 cars de ligne et mixtes.

- 1 service "SOS" disponible, 24 heures/24 et 7 jours/7, à la fois pour dépanner un autocar ou proposer en dernière minute une solution de transport de groupe.

- 5 points de vente Mariot Voyages à Croix, La Bassée, Lille, Valenciennes et Fournes-en-Weppes.

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Un service dédié aux "groupes"  

En parallèle d’un service "GIR autocar", Mariot Voyages dispose d’une équipe de cinq personnes dédiées uniquement aux groupes transportés en autocar. Si le service GIR gère quelque 70 départs annuels pour 3 700 clients (environ 400 000 € de chiffre d’affaires), la seconde entité réalise 1 800 devis et traite 600 départs (3 millions € de CA) pour le compte des comités d’entreprise, des associations et d’autres structures collectives. En progression constante, cette dernière a entre autres leitmotivs « de défendre une prestation plus qu’un prix », pointe Olivier Bonvarlet, son responsable.

Communication et fidélisation

Souplesse de l’offre ; partenaires testés et validés ; antenne joignable 24h/24 ; formation continue des conducteurs… « Notre souci est de proposer des voyages clé en main et de trouver au plus vite, et sur place, une solution en cas de problème », insiste Olivier Bonvarlet. Ce sens développé du service se reflète également dans la stratégie de communication. Lors de la publication de chaque nouvelle brochure, tous les clients "responsables de groupes" sont conviés à une journée de présentation. Sur 500 invités en moyenne, pas moins de 200 personnes y participent régulièrement. Résultat : « 95 % d’entre eux achètent au moins l’un de nos voyages l’année suivante », précise Olivier Bonvarlet en soulignant effectuer, en outre, trois à quatre opérations annuelles de communication plus classiques (mailings, appels…) ainsi que des offres ponctuelles. Il organise, également, un "Eductour surprise" pour remercier ses meilleurs clients (en gros une trentaine). En clair : il invite des "responsables de groupes" à découvrir, durant un week-end, une destination tenue secrète jusqu’au dernier moment.

60 % d’excursions à la journée

Précision : le service "Groupes autocar" a notamment pour spécificité de produire en moyenne 60 % de voyages à la journée, 30 % au week-end et 10 % en mini-séjour et séjour. La raison ? « Notre situation géographique », explique Olivier Bonvarlet. « En étant dans le Nord, nous avons la chance d’être très proches de cinq capitales, en l’occurrence Paris, Bruxelles, Londres, Luxembourg et Amsterdam. Nous le sommes également de nombreux parcs d’attractions, comme Disney ou Astérix pour ne citer qu’eux. Y proposer des voyages sur un jour ou un week-end n’est donc pas un souci. » Pour les destinations un peu plus lointaines, la donne change. Olivier Bonvarlet concède qu’il est plus difficile de proposer des séjours au-delà, par exemple, de l’Alsace ou du Périgord en raison du budget nécessaire et des temps de parcours qui peuvent en décourager certains.

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Encadré : Un voyage mystère pour entretenir la fidélité

Chaque année, Olivier Bonvarlet organise un « voyage mystère » à destination des bons clients. En Après le Futuroscope ou encore les Côtes-d’Armor les années précédentes, l’autocariste des Hauts-de-France a convié, en avril dernier, trente responsables de groupes et autant de conjoints à un éductour en Alsace. « On ne leur communique que les dates et les heures de départ et de retour. Même notre conducteur ne découvre les choses qu’au fur et à mesure afin de réduire au maximum les risques de fuites », s’amuse Olivier Bonvarlet du service "Groupes". « A l’aller, nous avons passé une bonne partie du trajet sur les GPS de nos téléphones pour deviner où nous allions, mais nous ne l’avons vraiment compris que quand notre autocar s’est arrêté pour la pause-déjeuner », témoigne avec sourire Bernard Delaby, le maire d’Haubourdin.

Cette formule surprise plait beaucoup, souligne Olivier Bonvarlet. Mais attention, obtenir son billet n’est pas donné à tout le monde. « Nous n’emmenons que nos meilleurs clients que nous tenons à remercier par ce biais », explique-t-il. « Cela nous permet de les chouchouter en passant un moment privilégié avec eux. Bien entendu, nous en profitons pour leur faire découvrir une région, mais ce n’est pas forcément notre but. En revanche, nous constatons à chaque fois un impact en termes de fidélisation de nos clients, ce qui correspond à notre objectif ».