Royer Voyages, 90 ans de bonne conduite

En jetant un regard rétrospectif sur le chemin parcouru par l’entreprise familiale alsacienne qu’il dirige aujourd’hui, Paul Royer peine à dissimuler une émotion et une fierté toutes légitimes. « Quand en 1928 mon grand-père a débuté son activité de taxi et de messagerie, il s’est installé à côté d’un débit de boissons que tenait aussi ma famille, près de la gare de Herrlisheim », raconte-t-il. « Bien qu’âgé d’à peine une vingtaine d’années, il possédait l’une des deux seules voitures du village grâce à son frère qui, travaillant à Paris, était plus aisé. Les gens faisaient appel à lui pour transporter des choses ou se rendre dans des communes voisines non-desservies par le rail. Il faisait avec les moyens du bord, et ça marchait ! » Cela a d’ailleurs tellement bien fonctionné que l’entrepreneur parvient dès 1933 à acquérir un minibus – ou plutôt une camionnette améliorée – pour acheminer des bateliers sur leur lieu de travail et proposer de premières excursions aux particuliers. Problème : son ascension est freinée, pour ne pas dire stoppée, par la Seconde Guerre mondiale.

Au lendemain du conflit, la vie reprend petit à petit dans une Alsace meurtrie. Dès 1946, Ernest Royer relance ses activités comme il peut, embauche de premiers conducteurs et ouvre des lignes régulières entre Wissembourg, Haguenau et Strasbourg. « A l’époque, il n’y avait pas de constructeurs d’autocars dans notre région, mon grand-père a donc dû partir à Lyon pour acheter un châssis à l’usine Berliet. Il l’a ensuite conduit, assis sur une caisse en bois, pour l’emmener chez un carrossier. C’était vraiment une autre époque », s’amuse Paul Royer en précisant aussi que c’est, à cette période, qu’Eugène Royer, son père, intègre l’entreprise. Profitant alors des Trente glorieuses, la petite compagnie déploie une gamme d’excursions en parallèle de ses dessertes régulières. La route du succès est toute tracée…

45 % du chiffre d'affaires dans le tourisme

Inscrite depuis dans l’ADN de l’entreprise, cette ramification en deux branches franchit une étape supplémentaire avec la fondation de l’entité Royer Voyages en 1985. « Il s’agissait de bien séparer nos activités "excursion/tourisme" de celles du "transport" afin de les développer au mieux et ainsi de pouvoir ajouter à nos voyages en autocars des offres en avion et des croisières », souligne Paul Royer qui a rejoint ses parents dans l’entreprise deux ans après ladite étape. Trente-trois ans plus tard, la donne n’a pas changé et le volet tourisme représente désormais 45 % des activités du groupe Royer. Ses autocars de tourisme sillonnent les routes de l’Irlande à la Russie, du Cap Nord à l’Andalousie, tandis que ses offres englobant un déplacement en avion couvrent l’ensemble de la planète.

De façon plus précise, plus de 55 000 clients lui font désormais confiance chaque année pour l’organisation de leurs voyages, dont 550 groupes pour des services personnalisés. Pour ce faire, l’entreprise dispose de treize agences de voyages (dont une au sein même de l’aéroport international de Strasbourg-Entzheim) et consacre deux équipes entièrement aux groupes (une en Alsace, l’autre en Lorraine). « Il est important et rassurant pour nos clients de trouver à côté de chez eux un interlocuteur qui peut leur proposer des services à façon », pointe Olivier Jarrige, le directeur commercial et marketing de Royer Voyages. « Outre cette proximité, nous leur garantissons aussi le fait que nous avons créé nous-mêmes les voyages en autocar et sélectionnés minutieusement l’ensemble des voyages en avion et en bateaux proposés dans nos catalogues. Nous connaissons tous nos prestataires, des guides aux restaurants en passant par les sites visités… »

Sens de l’écoute et du conseil, contrôle scrupuleux de l’offre… Pas de place à l’improvisation ! La rigueur alsacienne est de mise. Paul Royer ne badine pas avec la qualité de service. « Nos conseillères et nos conseillers voyages doivent être ouverts sur le monde et à l’écoute permanente du marché. Ils doivent savoir faire le tri entre un nombre d’offres toujours croissant afin d’aider au mieux les clients dans leur choix final tout en n’oubliant surtout pas que chaque client est différent. De même, ils doivent savoir faire preuve de réactivité pour fédérer tous les partenaires nécessaires à la bonne tenue d’un voyage, tout comme nos conducteurs doivent, eux, être les yeux et les oreilles de l’entreprise. Ils doivent nous rapporter ce qu’ils ont vu ou pensé pendant leurs déplacements afin que nous ayons en permanence des avis sur les prestations ».

Un dialogue permanent

Cette implication de l’ensemble des collaborateurs dans la bonne marche de l’entreprise se reflète également au quotidien dans le mode de management insufflé par Paul Royer. « Le dialogue entre tous est essentiel. Chez nous, on se parle », martèle-t-il en mettant en exergue son souci de garder les portes des bureaux ouvertes à tous et de voir les conducteurs les plus expérimentés transmettre leur expérience aux plus jeunes. Une formation continue contribue à ces échanges autant qu’elle vise à rappeler à tous les conducteurs que leur conduite – au sens propre comme figuré – doit être irréprochable pour satisfaire la clientèle. « Quand un client attend son car, sa première impression va dépendre du comportement du conducteur… » Est-il à l’heure ? Poli ? Souriant ? Autant de paramètres qui influent directement sur la suite du voyage et l’image de la société.

« Il est aussi important, pour moi, de pouvoir compter sur une équipe stable », poursuit Paul Royer en précisant que ses conducteurs affichent une ancienneté moyenne de dix ans et que certains de ses collaborateurs sont à ses côtés depuis trente ans.

Un salon dédié aux "groupes"

Pour marquer son 90e anniversaire, Royer Voyages a décidé, entre autres, d’intégrer des avantages à son offre de voyages mais aussi de réunir ses meilleurs clients "groupes" ainsi que des prospects lors d’un salon exceptionnel, le 12 octobre prochain au complexe l’EcRhin à Gambsheim. Le rendez-vous vise à permettre aux responsables de groupes de rencontrer ses équipes mais également une quarantaine de ses prestataires et partenaires. Plus de 500 personnes sont attendues.

 

Fidélité aux clients mais aussi aux salariés. Le caractère familial de l’entreprise prend encore un peu plus de sens. Quid dès lors de l’après Paul Royer, même si sa succession n’est – et de loin – pas d’actualité ? « Ma fille, qui va avoir 25 ans, travaille à Londres. Mon fils, de bientôt 21 ans, est pour sa part toujours étudiant », explique l’intéressé. « Mes parents ne pensaient pas que j’allais les rejoindre après mes études et une première expérience dans le groupe Faure en Rhône-Alpes. Ils m’ont laissé faire ce que je voulais, ce qui est un facteur de réussite. Mes enfants s’intéressent à l’entreprise, c’est sûr. Mais je veux leur offrir la même chance que j’ai eu, celle d’avoir la liberté de choisir ma vie ! »

 

Royer Voyages en chiffres

• 280 collaborateurs, dont 230 conducteurs (une centaine d’entre eux est dédiée au tourisme/grand tourisme).
• 214 autocars (Van Hool et Mercedes), dont 90 % répondent aux normes Euro5 ou Euro6.  
• 8,8 millions de km parcourus par an, soit 225 fois le tour de la Terre.
• 13 agences de voyage situées, entre autres, à Strasbourg, Mulhouse, Colmar, Sarreguemines, Behren-lès-Forbach, Grosbliederstroff et Metz.
• 5 sites d’exploitation (Ostheim, Illkirch, Herrlisheim, Rohrbach-lèsBitche et Behren-lès-Forbach).
• 4 brochures annuelles et un site de vente en ligne ayant attiré 55 000 visiteurs uniques en 2017 (www.royer-voyages.com).
• 29 millions € de CA pour un volume d’affaires de 36 millions € avec les reventes de tour-opérateurs.

Une forte croissance externe

Au cours des trois dernières décennies, Royer a notamment misé sur une forte croissance externe pour développer ses activités en Alsace mais, également, en Lorraine. Ainsi, dès 1990, l’autocariste s’implante en Moselle en reprenant l’entreprise Staub Voyages avant, huit ans plus tard, de racheter dans le même département la société Weber Littig. En 2003, c’est au tour de la SARL Knoery Frères de tomber dans son escarcelle, avec à la clé un site d’exploitation de 6 300 m2 à Illkirch (Bas-Rhin). L’acquisition en 2006 de KG Bus lui permet, cette fois, de bénéficier d’une base à Ostheim, aux portes de Colmar. En 2007, la Briam Socha SA de Grosbliederstroff intègre aussi le groupe qui devient, dès lors, l’un des principaux autocaristes privés de Lorraine. En 2013 enfin, le groupe devient également le propriétaire de l’entité haut-rhinoise Pauli Autocar.

Paul Royer va-t-il s’arrêter là ? Pas sûr puisqu’il se dit désormais ouvert à l’étude de toute opportunité dans tout le Grand Est mais aussi outre-Rhin, le siège de son entreprise à Herrlisheim n’étant situé qu’à 3-4 km à vol d’oiseau de la frontière allemande.