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Anthony Goret, directeur de la Communication du Snelac

Bus & Car - Tourisme de Groupe | Entretien | publié le : 30.04.2019 | Dernière Mise à jour : 30.04.2019

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  • Bruno Courtin

« On est passé de l’animation à l’immersion ! » Le Syndicat national des espaces de loisirs, d’attractions et culturels (Snelac) est l’organisme français représentatif du secteur des sites de divertissement au sens large, puisqu’il compte aussi parmi ses adhérents des parcs d’attractions, des parcs animaliers, des parcs aquatiques, des sites naturels et des sites culturels.

Organisme professionnel et syndical patronal, il est un observateur attentif des tendances du secteur et un acteur auprès des pouvoirs publics pour s’attaquer aux verrous qui bloquent encore son développement.

Il semble évident que le secteur se porte bien, mais avez-vous des chiffres précis pour étayer ce sentiment ?

C’est effectivement un secteur qui, globalement, se porte bien avec 63 millions de visites comptabilisées en 2018, ce qui représente un chiffre d’affaires global de 3 milliards d’euros, à comparer avec 54 millions de visites en 2017 pour 2,4 milliards de CA. Nous avons eu la chance de célébrer plusieurs événements marquants qui aident au développement comme les 25 ans de Disneyland, les 30 ans du Futuroscope, les 40 ans du Puy du Fou ou, cette année, les 30 ans du parc Astérix ou les 40 ans de Walibi Rhône-Alpes.

Peut-on dire que l’on entre dans une ère de maturité ?

C’est encore un secteur assez jeune et qui n’a pas fini d’évoluer. On distingue plusieurs périodes dans la vie des parcs, avec une première ère « des pionniers », comme La Mer de Sable, Le parc de Bagatelle, OK Coral, le Pal dans l’Allier nés d’initiatives et motivés par des passions individuelles. Elle a été suivie par des projets plus structurants comme le Futuroscope, le parc Astérix, le Grand Parcours du Puy du Fou, et naturellement Disneyland Paris… toute une série de poids lourds qui ont tiré le secteur vers le haut et entraîné de nouvelles exigences sur l’offre, tout en appelant à une professionnalisation de la branche.

Cette arrivée de nouveaux acteurs n’a-t-il pas aussi engendré des projets un peu farfelus qui n’ont pas résisté à la réalité du marché ?

C’est effectivement une période où l’on a cru que le succès était assuré avec de belles perspectives de retombées économiques. Encore aujourd’hui, nos études montrent qu’un euro dépensé dans un parc génère 3 euros de retombées indirectes dans l’économie locale. Cela a forcément attiré des acteurs qui ont voulu profiter de la tendance tout en séduisant des collectivités locales qui rêvent d’avoir leur parc avec des emplois non délocalisables. L’exigence du concept et de critères de gestion, dans un secteur qui ne compte pas de formation spécifique, a conduit à quelques accidents industriels, comme celui de Mirapolis en banlieue parisienne, du Bioscope proche de Strasbourg, et d’autres, qui ont servi de leçon et dont la profession se souvient.

A-t-on vraiment appris la leçon quand on voit la multiplication de nouveaux projets actuels ?

Vous ne pouvez pas empêcher les collectivités de vouloir exploiter un thème ou un personnage qui est ancré sur leur territoire. Les parcs sont avant tout des attractions locales ou régionales, qui finissent par faire partie du paysage et comptent beaucoup sur la revisite. D’où un renouvellement nécessaire de l’attractivité par la nouveauté. Il est habituel de consacrer de 15 à 20% du chiffre d’affaires pour l’investissement dans l’offre avec des pointes à 50% quand cela s’avère nécessaire. On observe d’ailleurs que la multiplication de l’offre sur site développe l’investissement dans des hébergements, ce qui tend à élargir la zone de chalandise. C’est la suite logique du développement de la restauration sur les parcs quand la journée entière était nécessaire pour pratiquer les activités, désormais deux jours sont nécessaires pour pratiquer l’ensemble des activités proposées par certains sites. Les parcs aujourd’hui accompagnent l’expérience du visiteur. Il y a toujours des contre-exemples dans un secteur qui se caractérise justement par sa créativité. J’en veux pour preuve Diverti Parc en Bourgogne, somme toute assez modeste dans sa proposition autour de labyrinthe, de jeux d’aventure ou de son parc zoologique de vaches, mais qui a imaginé toutes sortes d’hébergements insolites, en forme de vache, de goutte d’eau, d’observatoire des étoiles, qui fait qu’on vient davantage pour passer la nuit et accessoirement pratiquer les activités.

Quand vous parlez d’expérience, voyez-vous arriver de nouvelles attractions qui vont conduire les visiteurs vers de nouvelles directions ?

La concurrence est de plus en plus rude, d’autant que les zones de chalandise, comme je vous l’ai indiqué, ont tendance à se chevaucher davantage. La créativité s’exprime largement avec de nouveaux acteurs. L’an passé était l’année des escape games. Ils se sont multipliés à travers la France. J’entrevois pour cette année l’apparition de la réalité virtuelle et de tout ce qui va tourner autour de l’immersion. D’une certaine façon, c’est une réponse à la « météo dépendance », dont souffre la majorité des parcs dont les attractions sont en extérieur.

Le secteur a-t-il été fragilisé par les mouvements sociaux ou d’autres éléments perturbateurs ?

La grève de la SNCF n’a rien arrangé et la période de la Coupe du monde de football a été difficile à vivre pour certains parcs qui ont connu de sérieuses baisses de fréquentation. Il y a eu des périodes de fragilisation, mais pas d’alerte sérieuse, le secteur a eu la capacité de résister et de repartir de l’avant. Je constate que les gestionnaires de nouveaux sites ou ceux qui ont repris des sites en difficulté ont une approche très pragmatique, une volonté de calibrer le site en termes d’attractions, de ressources humaines, d’investissement à la hauteur de la zone de chalandise. C’est en cela que les échecs ont permis d’apporter plus de raison dans la taille des exploitations.

Ces nouveaux acteurs semblent relever désormais de groupes à dimension internationale…

Il y a eu un phénomène de concentration qui a conduit à la création de poids lourds du secteur, que ce soit la Compagnie des Alpes ou le groupe Looping en France ; et je n’oublie pas les groupes étrangers présents en Europe, y compris Disney, que ce soit Merlin Entertainment, Parques Reunidos ou Aspro Parks. Ils apportent du professionnalisme, de la mutualisation en termes de ressources humaines, de back office, de marketing, qui ne peuvent être que bénéfiques. N’oublions pas que la France bénéficie à ce titre d’un savoir-faire reconnu. Nous sommes leaders européens sur le nombre de sites, la variété de l’offre, le nombre de visiteurs… qui justifient que les entreprises françaises se développent à l’international, comme la Compagnie des Alpes ou, plus récemment, le Puy du Fou. Nous pouvons nous féliciter d’avoir, en France, une vraie culture des loisirs et du divertissement. Même pendant les années compliquées de crise économique et financière de 2008-2009, le secteur des sites de loisirs et culturels a continué d’investir avec des résultats qui se retrouvent aujourd’hui.

Peut-on déjà prévoir les réactions des nouvelles générations de clients ?

Nous avons la chance de ne pas être dans un clivage générationnel X, Y ou Z. Notre clientèle est principalement familiale ou tribale et c’est sans doute l’un des premiers lieux de partage entre générations. C’est l’endroit où l’on vit des émotions fortes ensemble. C’est sa composante humaine principale qui fait que l’on a peu de choses à craindre de l’avenir. Si l’on peut parler de nouvelles attentes, davantage réclamée par les jeunes générations, c’est sans doute l’immersion dans un univers donné et la personnalisation encore plus poussée de l’expérience.

Cela exige-t-il de renforcer les investissements technologiques ?

Oui sans doute, mais pas simplement. Il faut garder cet équilibre entre la technologie, et notamment la réalité virtuelle qui peut couper le visiteur du reste du monde, et le besoin de partager des émotions collectives. C’est subtil et il faut savoir doser les deux attentes. Typiquement, les casques de réalité virtuelle sur un roller-coaster n’ont pas déclenché un réel enthousiasme. Pour autant, on peut s’attendre à l’explosion des parcs de réalité virtuelle sur le modèle l’Illucity qui vient d’ouvrir à La Villette à Paris. Les joueurs individuels peuvent d’ailleurs se retrouver à participer à la même expérience virtuelle.

Est-ce que l’on peut arriver à présenter des offres tellement diversifiées que l’on perd un peu le fil de la thématique d’un parc ?

On se dirige dans plusieurs cas vers des offres hybrides. Je pense notamment aux parcs animaliers qui offrent aussi une partie d’attractions, comme Le Pal dans l’Allier, dont l’architecture sépare bien le parc animalier de la zone des attractions. Dans un autre secteur, certains châteaux ont une activité de parc animalier qui mélange finalement nature et culture qui se nourrissent mutuellement. Ce n’est pas gênant quand c’est bien organisé et cela présente l’avantage de consolider le modèle économique, de renforcer les retombées pour les collectivités et d’accentuer, dans certains cas, la tendance à la « resortisation ».

Quels seraient les nuages à dissiper pour que l’horizon soit encore plus clair ?

Notre mission principale en tant que syndicat patronal est d’analyser les questions sociales et de proposer des alternatives. Nous négociations la convention collective nationale avec les organisations qui représentent nos 50 000 salariés. La pénalisation des CDD à répétition est un sujet majeur dans une activité fondamentalement saisonnière. La volonté de fidéliser les salariés est très marquée dans notre secteur. Nous avons la possibilité de recourir au, contrat à durée indéterminée intermittent (à ne pas confondre avec le statut d’intermittent), un contrat qui annualise la durée du travail avec une concentration sur la saison. Les entreprises se doivent de le proposer après 3 saisons consécutives, mais les périodes d’interruption de l’activité sont parfois trop longue pour rendre le dispositif attractif.

Notre secteur ne connaît pas de formation spécifique sur le travail dans un site de loisirs ou culturel, c’est pourquoi la branche professionnelle est très active sur le volet formation et propose des Certificat de Qualification Professionnelle (CQP) pour les opérateurs. Nos entreprises font beaucoup de formation interne et les expériences de saisonnier dans nos sites sont de véritable tremplin : un quart des saisonniers signe un CDI à l’issu de leur saison. A noter que les fonctions transverses comme la communication, le marketing ou la maintenance, etc. sont assurés par des CDI, d’ailleurs 42% des salariés de la branche connaissent une évolution professionnelle.

Cet investissement des acteurs dans la formation, marque d’autant la volonté de fidéliser les salariés. Les enjeux de demain portent sur le développement de la marque employeur pour attirer les talents dans nos entreprises.

 

 

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