« Préparons les 40 ans qui sont devant nous ! » A la tête du salon depuis deux ans, Frédéric Lorin a entériné la disparition du MAP Pro désormais intégré comme un nouveau Village, baptisé La Destination France, au sein de l’IFTM Top Resa. Il répond à nos questions alors que se profile une édition particulière qui marque un passage important dans la vie du salon.
Que peut-on dire de cette 40ème édition de l’IFTM Top Resa ?
C’est d’abord une formidable reconnaissance de sa pérennité, malgré toutes ses évolutions. Le salon est, reste, le seul grand rendez-vous professionnel du Tourisme à travers toutes ces années et ses différents aménagement et déménagements.
Les participants de la première heure font-ils preuve de nostalgie par rapport aux premières années très festives ?
Je reçois un double discours, le premier est effectivement teinté de nostalgie « Ah Deauville, ses fêtes, son ambiance décontractée… », mais il y a aussi, et je dirais même surtout, un autre discours qui m’interpelle davantage : « Depuis le retour à Paris, le salon s’est bien professionnalisé, et depuis quelques années, on sent que le salon est plus à l’écoute et en phase avec l’évolution du marché lui-même ». Je salue naturellement ce discours qui traduit notre volonté d’être la vitrine et le reflet d’un secteur très changeant.
Le double discours est-il lié à un changement de génération au sein même de cette profession du tourisme ?
Pas systématiquement, même s’il est naturel que la nostalgie des années Deauville soit davantage le fait des plus anciens acteurs. Il faut saluer la longévité des dirigeants aux commandes des entreprises qui assurent une certaine stabilité, mais je constate aussi qu’ils sont engagés eux-mêmes dans la transformation des métiers. En revanche, parlez de Deauville aux nouvelles générations qui lancent les start-ups du tourisme, qui participent au Hakathon et autres challenges, cela n’évoque rien d’autre qu’un week-end qu’ils ont pu y passer récemment. Fort heureusement, ces références au passé s’estompent.
Mais alors comment marquer cette 40e édition, si ce n’est par un retour à la dimension festive des premières années ?
Il n’est pas question d’en faire une cérémonie des « anciens combattants » mais davantage de marquer un point d’étape, une longue étape. Le message est davantage tourné vers les 40 années qui sont devant nous en rappelant le parcours évolutif des 40 dernières années. C’est un peu pour cela que l’on a abandonné l’idée d’une soirée des 40 ans, qui aurait pu être la soirée de trop, celle qui ramène vers le passé alors que nos exposants organisent plein de manifestations festives chaque soir, tournées vers l’avenir. La traduction de ce renouvellement se fait à travers une communication renforcée et notamment une nouvelle charte graphique. Au final, notre vrai métier, c’est la mise en relation pour faire du business, ce n’est pas d’être organisateur de soirée.
L’an passé, dans ce même exercice de l’interview, vous insistiez sur cette volonté d’être le reflet de l’écosystème du tourisme. Comment allez-vous encore enrichir la vitrine ?
Merci de le rappeler car c’est effectivement toute l’orientation de l’équipe d’organisation. Le salon a déjà progressivement évolué en collant le plus possible à l’évolution des métiers. Son ADN originel est fortement empreint du Loisirs, ce qui faisait sens à l’origine, pour s’enrichir de plus en plus des autres aspects du voyage que sont le Business Travel, le tourisme de groupe et même le MICE. C’est en tous cas le sillon que nous creusons un peu plus chaque année. L’espace très conséquent qu’occupe désormais le Business Travel dans le salon en atteste et nous accueillons les acteurs majeurs de l’hôtellerie d’affaires comme Marriott International ou Louvre Hotels, des transports, des services. Nous sommes encore un peu timide sur le MICE, je le reconnais, mais c’est aussi en progression.
La seconde dimension que vous évoquiez l’an passé est celle de la technologie, de plus en plus présente aussi dans les métiers du tourisme…
Effectivement, cela va se traduire par le renouvellement de l’Hakathon, qui a très bien fonctionné l’an passé. Cette année c’est Speed Media qui va en être le parrain à la place de Sabre. Nous profitons aussi du retour du salon sur le Hall 7, sur les deux niveaux .2 et .3, pour consacrer quasiment tout le second niveau à une Tech Zone, comme le font pratiquement tous les salons internationaux. Outre le Hakathon qui va s’y dérouler, on va y retrouver tous les exposants à vocation technologique, le Travel Hub des start-ups, le Village digital, les différents challenges technos… Cette zone sera fortement marquée par la présence d’Amadeus. Pour y créer du flux, c’est là aussi que se dérouleront toutes les conférences et notamment les Assises du tourisme de groupe qu’organise Bus&Car.
Arrêtons-nous un moment justement sur ce marché du tourisme de groupe et la Zone qui lui est consacrée, La Destination France. Il ne me semble pas – au premier regard sur le plan du salon – qu’il se soit beaucoup développé par rapport aux éditions précédentes…
Il occupe plus de 1 000 m2, ce qui est une belle zone, et il faut rappeler qu’il fait désormais partie intégrante du salon, comme les autres Villages, et pendant les quatre jours. C’est déjà une belle progression par rapport à l’ancien Map Pro qui ne donnait pas entièrement satisfaction aux exposants, il faut le reconnaître. Je pense que c’est une transition, qu’il faut poursuivre notre travail de conviction auprès des régions, des collectivités territoriales et des acteurs du tourisme français. Je reconnais que je n’ai pas eu auprès des Régions l’écoute attentive et intéressée que j’espérais. Je constate que la nouvelle définition du partage des responsabilités en matière de Tourisme apporte un peu de confusion. Chaque région l’aborde à sa manière. A cet égard, l’approche de la région Occitanie est pour moi exemplaire, avec une prise en charge de la promotion de ses acteurs sur un même espace. C’est aussi la même démarche pour Paris-Ile-de-France, pour l’Agence de Développement Touristique Val de Loire - Loir et Cher et l’Agence Départementale du Tourisme de Touraine qui exposeront sous une enseigne commune « Val de Loire – Touraine / Loir-et-Cher » et de l’Aveyron.
J’aurais aimé que ce soit davantage le cas avec les autres régions et c’est un sujet que l’on va travailler, notamment avec Atout France. Nous avons d’ores et déjà engagé une forme de rapprochement avec Tourisme & Territoires, qui représente le niveau départemental, et j’attend beaucoup des initiatives communes que nous pouvons développer.
Continuons sur les nouveautés qui marquent cette 40e édition, quoi d’autre à signaler ?
Pour les destinations de loisirs, nous avions créé en 2013 la Travel Agents Cup, compétition en plusieurs étapes pour récompenser l’expertise et la compétence des agents de voyages. Pour cette 40e édition, et pour contribuer à animer le Village La Destination France, nous avons lancé la Travel Agents Cup Junior. En partenariat avec la FFTST, elle s’adresse aux étudiants qui se destinent à travailler dans l’univers du tourisme (BTS, Masters, Bachelors, MBA, DU et Licences professionnelles). Nous avons reçu plus d’une centaine de demandes d’inscription parmi lesquelles nous avons opéré une sélection avec un quizz en ligne. Les dix finalistes vont devoir présenter, de manière originale et en fonction d’un scénario spécifique qui leur sera proposé, une destination (région, département ou ville) exposant de la nouvelle zone « La Destination France » ou d’une région d’Outre-Mer. La dernière épreuve se déroulera sur le salon le vendredi 28 septembre. Il s’agit encore une fois de valoriser ceux qui seront les futurs ambassadeurs de la Destination France.
Vous avez aussi annoncé la création d’un Village des Influenceurs, est-ce que ce n’est pas cédé à la mode des bloggeurs et bloggeuses qui font le buzz sur le Net ?
Ce n’est pas une mode, c’est une réalité. Elle perturbe un peu le monde de la communication traditionnelle car c’est une autre approche éditoriale, très personnalisée. Nous accueillerons sur ce Village 32 influenceurs, sélectionnés avec Travel Insight, un expert de la viralité sur les réseaux sociaux. Certains d’entre eux ont jusqu’à 500 000 followers. Ils seront présents à tour de rôle pendant les quatre jours avec un planning de rendez-vous pour rencontrer des destinations, françaises ou étrangères, qui feront leur « pitch » pour les convaincre de leur intérêt pour les voyageurs. La particularité de ces influenceurs est d’avoir un angle d’attaque propre et qui fait leur originalité, certains sont très orientés gastronomie, d’autres trip nature ou culture.
Parmi les nouveautés annoncées, vous semblez aussi vous être fait plaisir avec ce « Pavillon des plus beaux trains du monde »…
Heureusement, ce n’est pas seulement pour mon propre plaisir même si je suis content d’avoir réussi à le mettre en place. C’est véritablement un segment important du voyage de luxe. Nous avons fait venir de gros opérateurs comme Belmont, ex-Orient Express, des trains indiens, le Transsibérien.
La partie « intellectuelle » du salon va-t-elle se renforcer aussi ?
Nous finalisons le programme des conférences, qui sera assez dense, avec pas mal de nouveautés. Je ne reviens pas sur les Assises du tourisme de groupe que vous aurez certainement l’occasion de développer dans vos colonnes. Nous allons inaugurer, chaque jour, un programme court de 30 mn pour exposer les grandes tendances du voyage avec un expert légitime : ce sera un cadre de chez Accor, un dirigeant de la SNCF ou d’Air France, … l’idée est d’insister sur une tendance du moment qui va développer en segment de marché et donc préparer les ventes de demain.
Et que dire des nouveaux acteurs, qui ont « disrupté » le marché du voyage ces dernières années ?
Certains seront présents et cela traduit bien notre volonté d’être le reflet de l’évolution du, des métiers. Uber sera exposant sur la zone d’intermédiation et Airbnb est déjà exposant depuis l’an passé sur le Club Affaires. Notre position est claire, la profession ne peut pas avoir un discours défensif et passéiste, même si nous sommes d’accord qu’il faut mettre de la régulation dans les pratiques. Ces acteurs sont là pour rester dans la durée et il est préférable de chercher la bonne manière de travailler avec eux, en bonne intelligence et en complémentarité.
A contrario, il n’y aura pas de Villages qui disparaissent parce qu’ils n’auraient plus lieu d’être ?
Non, pas du tout, tous les Villages thématiques précédents sont renouvelés, celui de la Croisière, des Tour-opérateurs, des Réseaux, naturellement, mais aussi le Village de la Montagne, le Village des Parcs d’attraction ou le Village du Développement durable.
En résumé, une édition qui vous donne – à vous en tous cas – plutôt satisfaction…
Le salon se porte bien. Au-delà de la performance commerciale, qui se traduit par une augmentation de surface, les nouvelles orientations prises sont saluées, non seulement par l’arrivée de nouveaux exposants, mais aussi par la plus forte présence d’exposants traditionnels. Je le prend comme une reconnaissance des efforts entrepris depuis au moins deux ans pour s’affirmer comme le seul événement BtoB de la profession. Oui, bien sûr, il garde la dimension festive qui fait partie de l’ADN du tourisme, mais les exposants me confortent dans la dimension business qui se développe et qui justifient leur implication.
Et pour finir sur une note, qui semble toujours faire polémique, affirmez-vous que les agents de voyages de la distribution sont présents sur IFTM Top Resa ?
Je voudrais vraiment tordre le cou à cette fausse idée que j’entends régulièrement. Ce n’est pas, de ma part, une affirmation gratuite puisque nous badgeons tout le monde. Il y avait quelque 5 000 agents de voyages pour l’édition 2016 et 6 530 pour l’édition 2017. Là où il y a encore un effort à faire de notre part, c’est le fameux « dernier kilomètre ». Les agents sont présents sur le salon, pas suffisamment visibles sur les stands des producteurs. C’est le but des animations que nous allons multiplié avec les réseaux sur les principaux Villages.
Et que nous préparez-vous pour l’édition 2019 ?
C’est encore trop tôt pour livrer le fruit des réflexions, même si elles sont déjà engagées. Disons qu’il y a une piste qui nous mobilise qui serait l’ouverture au grand public sur une journée, si on décide de décaler les dates en incluant un samedi. Il faut en parler davantage avec les exposants.