Alentour est le résultat de la mission confiée à la Banque des Territoires par le ministre Jean-Baptiste Lemoyne pour que l’offre atomisée des prestataires de loisirs trouve une porte digitale largement ouverte sur le grand public.
Certains observateurs dubitatifs pourront arguer qu’il s’agit du énième lancement d’une tentative de mise en marché de l’offre touristique française, et qu'il fait suite à une longue liste d’échecs commerciaux (Resinter, Hexatourisme, Le Bon Guide). Les plus optimistes et enthousiastes, au rang desquels Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d’État en charge du Tourisme, se convaincront que cette fois-ci est la bonne, en raison de la stratégie adoptée et des partenaires mobilisés.
Ce que n’est pas Alentour
Dans un premier temps au moins (il ne faut pas insulter l’avenir), Alentour n’est pas un nouveau portail grand public (en .fr ou .com) pour réserver des prestations touristiques.
Alentour ne va pas permettre de réserver son hôtel en France ou son billet d’avion ou de train. Les porteurs du projet, dont Olivier Sichel, directeur de la Banque des Territoires, ont fait le juste constat que le créneau est largement occupé par Booking.com, Expedia et consorts…
Dans un premier temps, pour aller plus vite, Alentour ne cherche pas à fédérer individuellement les prestataires avec une promesse de ventes, rémunérées par une commission.
Agrégation des offres loisirs
La stratégie adoptée est donc de se concentrer uniquement sur les offres des prestataires de loisirs et d’activités de détente : location de VTT, randonnée en kayak, canyoning, …. Mises bout à bout, toutes ses activités disséminées aux six coins de l’Hexagone représentent un volume d’affaires estimés à 22 milliards d’euros, dont 5% seulement sont distribués via un outil digital (application ou site). Il y a donc de quoi faire pour être LE portail d’accès à ces activités atomisées.
La seconde option est de se reposer initialement sur les BMS (Booking Management System), des sites ou plateformes qui ont déjà fait un premier travail de recensement et de rassemblement de ces « petits » producteurs. Les deux plus importants, Regiondo et Bookingkit, ont signé un accord pour basculer leur contenu sur Alentour. D’autres accords sont en négociation auprès des dizaines de BMS plus ou moins spécialisés sur un secteur de loisirs. Pour autant, rien n’empêche un producteur individuel de se rapprocher de l’équipe d’Alentour pour être aussi référencé.
La troisième caractéristique est de se reposer sur des « distributeurs » qui vont faire le travail de mise en relation entre Alentour et les clients finaux. Ces distributeurs sont essentiellement les sites des institutionnels du tourisme : CDT et Offices de Tourisme, et les hébergeurs de toutes natures (camping, hôtels, résidences, …). Leur intérêt est de proposer à leurs clients un séjour « enrichi » en les incitant, les invitant à pratiquer les activités de loisirs à proximité.
Alentour est donc amené à fonctionner en « marque blanche », comme moteur de proposition et de réservation des prestations « sélectionnées » dans le vaste catalogue national par le distributeur.
Le modèle économique
Le distributeur a accès à la base Alentour gratuitement. A lui d’opérer la sélection qu’il va mettre en avant auprès de ses clients. Idem pour les offices de tourisme. Alentour se rémunère par une commission sur chaque réservation effectuée par le client.
Le modèle impose de partager cette commission avec les BMS qui ont contribué à alimenter la base. Information top secrète pour l’instant : « Nous serons très compétitifs et tout est inclus dans notre commission, y compris celle reversée au BMS », affirme Timothée de Roux le patron d’Alentour.
Les conditions du succès
Le modèle choisi évite plusieurs écueils : la longue collecte des informations auprès de chacun des prestataires de loisirs, dont beaucoup ne sont pas encore équipés pour avoir une vraie stratégie digitale ; la volonté de s’adresser directement au grand public avec des moyens de communication forcément très coûteux et sans commune mesure avec ce que peut investir Google, Booking, Expedia ou Airbnb…
Au-delà de la richesse du « stock », qui peut s’entretenir par de bonnes relations avec les BMS et les Institutionnels, le modèle repose sur l’efficacité des distributeurs et l’intérêt qu’ils vont avoir à proposer les prestations à leurs clients. « Le besoin de vivre une expérience locale plus intense est un formidable moteur », justifie en l’occurrence Jean-Baptiste Lemoyne. « C’est un service apporté aux clients par les distributeurs qui peut se traduire par une prolongation des séjours en multipliant les activités à proximité ».
L’autre argument est la puissance et la ramification de la Banque des Territoires. Elle est au cœur du dispositif. La société Alentour est contrôlée par la BdT, associée à deux puissants partenaires : Amadeus qui apporte sa solution technique déjà éprouvée (Amadeus Discover, opérationnelle sur la Côte d’Azur) et Dawex, un géant de l’échange de données, qui doit fluidifier la circulation d’informations et faciliter la monétisation.
Le timing du déploiement
Le lancement officiel est possible car Alentour a choisi deux destinations pilote pour tester le dispositif : les Alpes-Maritimes en partenariat avec CRT local et les deux Charente, via Charentes Tourisme. Un nouveau partenariat vient d’être signé avec l’Agence Savoie Mont-Blanc. A ce jour, l’inventaire compte près de 2 500 prestataires touristiques « Nous sommes déjà la première plateforme au niveau de la France », se félicite Timothée de Roux. L’enrichissement continue pour un déploiement progressif tout au long de 2022 et une couverture totale, en tout cas la plus totale possible, du territoire national en fin d'année prochaine.
« J’ai même le secret espoir que ce modèle inspire quelques pays voisins et que nous puissions exporter Alentour », imagine déjà Jean-Baptiste Lemoyne.