Les réservations des visiteurs asiatiques ou européens pour les châteaux de la Loire devraient se multiplier pour les beaux jours, mais rien ne bouge et le secteur du tourisme s'inquiète des conséquences de l'épidémie de coronavirus.
Un secteur du tourisme est très préoccupé. C'est celui qui gravite autour d'un joyau du patrimoine français, les château de la Loire. "Il y a un impact évident sur les visiteurs en provenance de Chine, Taïwan et de Corée du Sud. Et aussi sur la clientèle italienne, très importante", explique Jean d'Haussonville, le directeur général du Domaine national de Chambord (Loir-et-Cher). Depuis le début de l'épidémie, la fréquentation du château a baissé des deux tiers pour ces trois pays d'Asie.
Mais pas encore de panique, la part de cette clientèle internationale reste modérée dans le Centre-Val de Loire. Dans la seule région française épargnée par le coronavirus jusqu'à jeudi 5 mars où deux premiers cas ont été signalés, 30% seulement des touristes viennent de l'étranger. A Chambord en 2019 par exemple, seulement 25.000 Chinois, 8.000 à 10.000 Taïwanais, et autant de Sud-Coréens ont visité le château de François Ier, sur le 1,1 million de visiteurs.
« L'année sera difficile »
"Depuis le début de l'année, la fréquentation est toujours en augmentation. Mais, nous restons sur des petits mois d'hiver, et il est évident que l'année sera difficile", reconnait toutefois M. d'Haussonville. Même constat du côté d'Amboise (Indre-et-Loire): "Le Clos-Lucé ne ressent pas de conséquences significatives", confie-t-on au château de Léonard de Vinci. La fréquentation en février 2020 y a même été en hausse par rapport à février 2019.
"On constate simplement un certain repli de la fréquentation asiatique. Toutefois, la part de la fréquentation des ressortissants chinois étant de 0,4% en 2019 (2% pour l'ensemble des pays d'Asie), la diminution de leurs venues n'a pas un grand impact sur la fréquentation générale", relativise une porte-parole.
Des groupes scolaires annulent
Cependant, le château a récemment enregistré des annulations de groupes scolaires français et étrangers. Des groupes de touristes italiens, chinois et japonais ont aussi décommandé. "Les professionnels qui annulent, ce n'est jamais un signe d'optimisme", s'inquiète Jean d'Haussonville, qui rappelle toutefois que 85% des visiteurs de Chambord viennent de France et d'Union européenne.
"La question pour nous, c'est l'effet sur les clientèles européennes", prévient-il. "Si les visiteurs du Royaume-Uni, d'Espagne, d'Italie et du Benelux ne peuvent plus circuler, là, on va en sentir l'effet." Si les châteaux baignent encore dans une sorte de douceur ligérienne, les restaurateurs de la région s'inquiètent plus franchement.
« Je stresse d'ouvrir ma boîte e-mails »
"Les réservations de l'étranger devraient arriver maintenant, pour les trois mois à venir. Rien n'arrive alors que l'on devrait être en plein boum", déplore Sabine Ferrand, la présidente régionale de l'Union des métiers et industries de l'hôtellerie (Umih), principale organisation du secteur. "Moi qui travaille beaucoup avec la Chine, Taïwan et le Japon, j'ai eu 28 cars d'annulés", assure la restauratrice de Saint-Laurent-Nouan, près de Chambord. "Cela m'inquiète, c'est comme en 2015 après les attentats. C'est moins brutal, mais on a des annulations tous les jours. Je stresse d'ouvrir ma boîte e-mails."
"Si ça touche la clientèle européenne, là ça sera grave", prévient-elle aussi. Le secteur, qui avait beaucoup fait ces dernières années pour promouvoir son territoire à l'étranger, doit rapidement changer de cible.
Activer un « plan B »
Selon le président de la région, le Centre-Val de Loire doit désormais activer son "plan B" et se recentrer sur l'Hexagone. "Le déploiement de notre communication vers ces pays-là (d'Asie, NDLR) ne va pas se faire comme prévu. On va la reporter", explique François Bonneau.
Cibler les Français
"On va plutôt travailler à une intensification vers les cibles nationales, notamment l'Ile-de-France", révèle l'élu, qui rappelle que le tourisme dans la vallée de la Loire "n'est pas centralement un tourisme international", avec environ 70% de visiteurs français. "Si on perd la moitié du reste (environ 15% NDLR), ça augmente notre capacité d'accueil au niveau national", préfère-t-il positiver. "Mais il faut être là pour fournir l'offre."
"Si les étrangers ne peuvent plus venir, les Français ne pourront plus partir à l'international. On peut les capter", espère-t-il. "C'est à notre portée", insiste M. Bonneau. "D'autant plus que l'on est sur du tourisme tendance: ce n'est pas installer sa serviette de plage et boire frais."