Ange Derment, ancien responsable du département Groupe chez Transat France, a rejoint l’équipe TUI France depuis la fusion-absorption intervenue en 2017. Il «règne» sur tout un étage du siège de Levallois-Perret, conscient d’assurer avec ses équipes un volume très confortable du CA du groupe.
Sans fausse modestie, Ange Derment, directeur de la division groupes et collectivités de TUI France, débute la conversation en assénant quelques chiffres significatifs : « Avec les engagements pour 2018, nous allons finir l’exercice autour de 280 millions d’euros, 156 millions pour les groupes « privés » et 123 millions pour les collectivités, CE et associations. Cela représente plus de 25 % du CA total du groupe TUI France et près de 160 000 clients. »
La progression est significative sur l’exercice précédent qui affichait moins de 140 millions d’euros. Il faut dire que l’apport de Transat France au chiffre d’affaires de TUI France est davantage qu’un ballon d’oxygène mais bien une expertise reconnue. C’est pourtant ce qui s’est passé quand l’ex-équipe Groupe de Transat France a pris ses quartiers dans les bureaux de Levallois-Perret. Elle constitue la grande majorité des 48 commerciaux et des 14 responsables de production.
Cette taille critique au sein de TUI France permet à l’équipe d’Ange Derment de disposer d’une large autonomie pour concocter sa production. « Nous sommes une business unit avec notre propre modèle économique. Nous avons nos acheteurs basés en France », insiste le directeur. « Pour autant, nous pouvons faire jouer la synergie corporate quand c’est nécessaire, notamment en utilisant les réceptifs TUI sur nos destinations, quand ils sont pertinents ». Pour la division Groupe, la fusion des deux entités Transat France et TUI France est une illustration du concept win win. Comme pour la plupart des tour-opérateurs, son activité a pour fonction intéressante de conforter les risques d’affrètement aérien.
En utilisant très majoritairement, à 80 %, les vols de la compagnie interne TUIFly, les passagers groupes sécurisent le plan de vol. En retour la division Groupe peut compter sur le grand nombre de départs de province (70 % des affrètements) qui rapprochent les propositions de leurs clientèles en régions.
De même, cette clientèle apporte un socle solide à la fréquentation des clubs (Lookéa et Marmara) et alimente les départs des circuits. « En dehors de la haute saison, nous apportons de 4 à 6 points de taux d’occupation supplémentaires », confirme Ange Derment. « Ce qui est loin d’être négligeable en termes de rentabilité. »
De fait, 70 % du CA du segment « groupes privés » concernent des séjours en clubs, pour 30 % de découverte en circuits accompagnés (43 000 pax prévus sur la seule année 2018).
Cette force de frappe permet d’être un interlocuteur de choix pour les agences qui ont des groupes à satisfaire. D’ailleurs 65 % du volume des ventes sont réalisés via les agences de distribution. Les groupistes sont aussi des partenaires importants pour l’achat des séjours dans les clubs de vacances.
L’influence des taux de change
Le bassin méditerranéen et les grandes métropoles européennes restent un terrain de prédilection des groupes, notamment en raison de la forte présence des clubs Lookéa et Marmara. « Nous représentons 25 000 pax sur la Grèce et ses îles, 23 000 sur l’Espagne, 22 000 pax sur l’Italie dont la Sardaigne et la Sicile. Parmi les thèmes de plus en plus populaires, la découverte de la culture s’affirme dans les grandes capitales européennes. Sur les 43 000 pax de circuits, nous en comptons plus de 15 000 sur nos week-ends en Europe », confirme le directeur.
L’activité du long courrier est plus dépendante de l’évolution des taux de change qui va déterminer l’attrait soudain pour une destination rendue plus accessible, comme ce fut le cas pour l’Afrique du Sud, avec une baisse de 40 % du rand sur un an. Pour autant, les « classiques » ont toujours la vie dure, avec un trio de tête : le Canada (10 000 pax annuels), la Thaïlande (7 000 pax annuels) et les États-Unis avec 5 000 pax.
Parmi les destinations montantes, Cuba bénéficie de la présence de trois Lookéa et de contacts privilégiés de TUI avec les opérateurs locaux, Cubanacan et Gaviota. Le personnel local de TUI peut ainsi s’assurer du suivi des circuits sur le terrain.
Du côté des CE et des associations, le marché évolue progressivement. Les groupes constitués restent le fait majoritairement des CE, les GIR étant davantage portés par les seniors. « Nous avons désormais une production différenciée selon les catégories de seniors, qui refusent d’être considérés comme du 3e âge », commente Ange Derment. « Nous différencions les circuits avec des offres ciblées. Nous sommes un peu comme dans une boulangerie qui vend toujours un maximum de baguettes – nos produits Primo – mais qui offre aussi une sélection de pains spéciaux – nos offres Sensationnelles. »
Dans cette offre adaptée, un second axe en progression touche un tourisme solidaire ou participatif avec des programmes de logement chez l’habitant au Canada, la visite d’écoles à Cuba, la participation à des projets humanitaires en Birmanie, quelques exemples pour illustrer cette tendance.
La division Groupes et Collectivités de TUI France peut se permettre d’afficher une grande satisfaction, confortée par le taux important de repeaters qui reviennent dans les clubs et les circuits. « Aujourd’hui, nous représentons environ 65 % de la clientèle des clubs francophones dans le monde », brandit le directeur qui ne compte pas s’arrêter là et témoigne aussi de frustration. « La géopolitique reste un élément sensible pour les groupes qui ne veulent pas prendre de risque. Malgré nos efforts, la Tunisie a beaucoup de mal à reprendre du poil de la bête. De même que la Turquie. Les progrès sont laborieux mais j’ai conscience que nous avons des parts de marché encore à récupérer. »