Les villes investissent massivement dans la construction de palais des congrès ou la rénovation des équipements existants. Mais cette concurrence exacerbée rend la rentabilité économique de plus en plus incertaine.
Un vent de renouveau souffle sur les palais des congrès. De Rennes au Cap d’Agde, de Metz à Carcassonne, toutes les villes - grandes et moyennes - veulent leur équipement. Après une longue stabilisation de l’offre, 24 sites sont sortis de terre ces cinq dernières années, portant le total hexagonal à 200.
Parmi eux, le Centre de Congrès du Chapeau Rouge à Quimper, le Centre Paris Saclay Massy, le Carré des Docks au Havre ou le nouvel hall d’Eurexpo à Lyon. Sans oublier le Paris Convention Centre (porte de Versailles), le plus grand d’Europe capable de recevoir jusqu’à 35 000 personnes et qui a boosté le tourisme d’affaires dans la capitale.
Avec 212 congrès internationaux accueillis en 2018 (contre 190 en 2017), Paris est ainsi redevenue la première destination mondiale de congrès, selon l’International Congress and Convention Association, devant Vienne, Madrid, Barcelone et Berlin. Seconde ville française du classement, Lyon pointe loin derrière (63ème), suivie de Marseille (77ème), Toulouse et Bordeaux.
Cette folle course n’est pas terminée. Une quinzaine de nouveaux lieux sont encore attendus d’ici 2025, comme le Pex à Toulouse en 2020 ou le CO’Met à Orléans (2021). Sans oublier les rénovations, à l’instar du Palais des Congrès de Saint-Malo, qui vient de rouvrir après dix mois de travaux, ou du Centre des congrès d’Angers.
2018, année record
Les enjeux font saliver les élus locaux. Selon l’Union française des métiers de l’événementiel (Unimev), qui parle d’une « année 2018 record » en termes d’investissements, 2800 congrès de toute taille sont organisés dans l’Hexagone chaque année. Et c’est sans compter sur les conventions et autres séminaires…
Mais attention à l’overdose ! D’autant que pour attirer des voyageurs d’affaires qui dépensent deux à quatre fois plus qu’un touriste lambda et remplissent les hôtels en basse saison, les métropoles n’hésitent pas à casser leurs tirelires !
Deux écoles s’affrontent. Certains prônent le geste architectural fort. Jean Nouvel avait montré la voie à Tours, il y a 25 ans. De Jean-Michel Willmotte, qui a conçu le nouveau palais Robert Schuman de Metz, à Christian de Portzamparc, qui a dessiné le site de Paris-Saclay, les architectes « stars » mettent la main à la pâte.
D’autres préfèrent investir des lieux historiques à la forte personnalité pour faire la différence. À Valenciennes, la nouvelle Cité des Congrès intègre la centrale électrique de l’ancien site industriel de Vallourec. Et à Rennes, l’équipement a été aménagé dans le Couvent des Jacobins datant du XIVème siècle. À Avignon, les entreprises peuvent même se réunir sous les voûtes du Palais des Papes !
Éco-responsabilité
Pour autant, tous parient sur les technologies et la digitalisation afin de satisfaire des organisateurs qui réclament désormais une véritable expérience émotionnelle, argument majeur pour convaincre des congressistes de faire le déplacement.
Autre tendance lourde : l’éco-responsabilité, alors que de plus en plus d’entreprises ajoutent un volet « développement durable » dans leurs appels d’offre. Des décors recyclables à la distribution des repas non consommés à des associations, un quart des équipements a entrepris une démarche d’écocertification.
Enfin, les villes jouent la carte de la polyvalence. Amphithéâtres modulables, halls aménageables, salles de réunion et salons événementiels se mêlent en un même site, pour accueillir aussi bien des séminaires que des concerts ou des dîners de gala. Objectif : mieux amortir les équipements. Car 39 % des établissements accueillent moins de 100 manifestations par an, contre 29 % en 2014, prévient le cabinet Coach Omnium. Et hormis Paris et quelques grandes métropoles, il est difficile d’attirer les événements internationaux.
Les villes moyennes préfèrent se concentrer sur la clientèle française, voire régionale, en misant sur l’accessibilité (notamment en train) et les pôles de compétitivité (par exemple la filière « végétale » à Angers). Encore faut-il ne pas oublier les à-côtés. Le nombre de chambres 3 et 4* est parfois insuffisant et constitue un frein pour accueillir de grandes manifestations. Dans cet environnement fortement concurrentiel, la rentabilité est de moins en moins souvent au rendez-vous. Gare au réveil difficile !