A l'occasion de la sortie du Baromètre 2023 "Courts séjours, Vacances, E-tourisme, Nouvelles tendances", réalisé par le cabinet Raffour Interactif, Guy Raffour répond à Tour Hebdo.
TH : Bonjour Guy Raffour, vous avez conclu votre Baromètre 2023 "Courts séjours, vacances, E-tourisme" ce mois de juin. Pouvez-vous nous en dire quelques mots ?
GR : Ce Baromètre nous mobilise chaque année entre la mise au point des nouvelles questions, le terrain par enquêteurs professionnels, puis les traitements et analyses. Nous aboutissons à un document de 155 slides classés en 28 thèmes. Parmi ceux-ci les séjours pris par les Français : courts, longs, avec hébergement payant ou non ; les destinations : France/ Étranger, mer, montagne, campagne, lac, villes, croisière etc. ; les 25 critères de choix de ces destinations ; les hébergements préférés ; le budget Vacances ; la préparation en ligne des séjours & les médias utilisés, les contenus jugés utiles en mobilité, la lecture et l’influence des avis, la réservation en ligne et bien sûr les intentions de départ 2023...
TH : Vous avez créé ce Baromètre en quelle année ?
GR : En 2002, avec l’objectif de mettre à disposition du secteur des résultats fiables sur tous les comportements touristiques des Français. Les 21 années déjà réalisées offrent un panorama inédit et précis du secteur du loisir et des Français concernés. Les résultats sont segmentés par profils : âges, catégories socioprofessionnelles du chef de famille, nombre de personnes dans le foyer, revenus, taille de la commune de résidence et région. Ce Baromètre est ainsi une mine d’informations disponibles au moment du besoin. Les résultats sont exprimés en % mais aussi en volume de Français concernés. Ils sont présentés dans des graphiques didactiques et 28 analyses approfondies. Ainsi les nouvelles tendances et les évolutions constatées permettent aux professionnels de mieux cibler leurs actions commerciales, marketing, de production.
TH : Pourquoi choisissez-vous comme méthodologie un terrain téléphonique par enquêteurs ?
GR : Nous souhaitons interroger les Français dans leur ensemble. 99% des Français de 15 ans et + possèdent un téléphone fixe ou mobile. Ce n’est pas le cas avec l’Internet qui a un taux de pénétration de 86%. Quand on mesure des taux de départ, il est important d’interviewer des Français représentatifs de la « population mère » des 15 ans et + (55,4 millions) et également pour mesurer le taux de pénétration du E-tourisme. Par ailleurs on appelle ces Français, sélectionnés par des quotas de représentativité (5 critères) et un plan de sondage actualisé par les données Insee. Ainsi ces Français ne se sont pas connectés volontairement à un panel par Internet, souvent incentivés par des cadeaux, surconsommateurs et qui répondent alors de façon « autoadministrée ». Les Français que nous interrogeons par téléphone parlent avec des enquêteurs professionnels. On obtient à la fois des résultats quantitatifs solides et aussi tous leurs verbatims explicatifs. On les interroge sur les séjours réellement effectués et sur ceux qu’ils envisagent pour 2023 ainsi que sur les raisons de tel ou tel comportement. Le terrain équivaut à 600 heures d’entretiens avec les 1000 Français. Il nous permet d’obtenir une masse d’information extrapolable de grande qualité. Notre expérience de 34 ans dans le secteur et de 21 Baromètres ajoutent la connaissance des nouveaux comportements touristiques.
TH : Quel regard portez-vous sur ces 21 années d’analyses ?
GR : Chaque année a révélé des changements conséquents. En effet les 3 types de séjours sont très différents. Les courts (1 à 3 nuits) sont expérientiels, pris tout au long de l’année pour des pauses thématiques. Les longs séjours non marchands apportent le confort des habitudes et des repères, la rassurance du cocon familial ou amical, de la souplesse et de la facilité organisationnelle. Les longs marchands (hébergement payant) sont ceux où les Français investissent le plus en recherche préalable, en budget et en émotions. Ils représentent la nouveauté, le changement, la découverte. Chaque année les Français arbitrent sur ces 3 types de séjours sur, leur durée, leur fréquence, leur contenu et ce en fonction de leur budget, envies, entourage, travail, santé etc. Partir pour un Français sur deux est un « Besoin vital » mais ils doivent considérer, avant le loisir, les charges contraintes (logement, alimentation, énergie, transport, habillement etc.). La crise sanitaire leur a appris à gérer le temps, la distance, la flexibilité contractuelle, avec une approche des destinations en 4 saisons, une forte adaptabilité, un besoin de nature, de liberté, de convivialité. Le réchauffement climatique et les changements météorologiques accentuent cette diversité. Le télétravail bouleverse les habitudes par des séjours hybrides où ce dernier est désacralisé au profit de la famille. La présence d’une information ubiquitaire grâce aux médias interactifs offre aux Français une grande souplesse organisationnelle en recherches, réservations, modifications, partage.
TH : Avez-vous décelé des nouvelles offres ces 21 dernières années ?
GF : Oui, la montée en puissance du E-tourisme avec l’impact considérable du smartphone en termes pratiques mais aussi dans son utilisation pour les réseaux sociaux, également les nouvelles formes de transport comme le covoiturage et les logements loués à des particuliers, ainsi que ceux atypiques. Et au global une forte demande de personnalisation, de thématisation, d’empathie dans l’accueil.
TH : Voyez-vous un rôle sociétal aux Vacances ?
GR : Justement, cette année on a mené une étude approfondie sur les raisons de non départ. En effet les bienfaits des vacances sur la santé mentale et physique des Français ne sont plus à démontrer. La crise sanitaire que l’on a vécue a eu des conséquences importantes sur les relations humaines, les lieux de socialisation, le « vivre ensemble », la priorisation de sa famille vs le travail. Les vacances contribuent à atténuer les tensions. Elles sont une soupape vis-à-vis du quotidien, enrichissent par les rencontres et les changements, elles ressourcent durablement. Leur bénéfice va bien au-delà de la durée des séjours car dès leur préparation on s’imagine en séjour et le multimédia y contribue. En 2009, 52% des Français de 15 ans et + ont pris des vacances (au moins un long séjour de loisir marchand ou non marchand). Ils ont été 60% en 2022. Il y a donc une progression mais on doit collectivement tout entreprendre pour augmenter encore ce taux. 20% des Français ne sont pas partis en vacances pour des raisons financières, 20% pour d’autres raisons (santé, personnes à s’occuper, travail, nouvelle résidence, isolement etc.). On voit dans nos résultats que le bénéfice des vacances n’est pas tant lié à la distance qu’à la prise en charge pour un « lâcher prise », à une coupure nature, découverte, humaine etc.
TH : Beaucoup de changements constatés au fil de ces Baromètres !
GR : Oui, je pourrais évoquer longuement ces résultats tant les évolutions sont importantes. Indubitablement ce Baromètre permet de gagner du temps grâce aux analyses « clef en mains » fournies. Il optimise la visibilité sur le secteur du loisir grâce à la mesure de la consommation et des besoins des Français. Notre secteur est passionnant et porteur. Mais il doit faire face à de très nombreux défis : environnementaux (suffisance des ressources notamment en eau, énergie non carbonée etc.), géopolitiques (conflits, instabilités), socioéconomiques (inflation, accès aux crédits, logement etc.), présentiels (coexistence entre les locaux et les touristes), technologiques accentués par l’IA etc. Ces défis doivent être abordés avec lucidité et de façon équilibrée, argumentée, pour que l’on puisse encore longtemps profiter des bienfaits incontestables de cette grande et belle idée des vacances et du loisir pour le plus grand nombre.
Pour une présentation détaillée du Baromètre et son Bon de commande, cliquez ici (PDF téléchargeable)