« Jamais, en tant qu’économiste, je n’ai assisté à une révision aussi rapide des perspectives de croissance de la part du FMI : + 2 points en quelques semaines ! » clame Emmanuel Lechypre en introduction de son intervention dans le cadre du Forum du SETO qui vient de se dérouler à Rabat
C’est sur cette note optimiste qu’Emmanuel Lechypre livre ses analyses devant le parterre attentif des congressistes du SETO. Il faut dire que cette prise de parole était attendue, tant le contexte géopolitique se complexifie de jour en jour. Aussi, notre éditorialiste se veut rassurant : « la croissance mondiale dépassait allègrement les 3% l’année dernière. Mais les prévisions du FMI pour 2024 laissaient entendre un sérieux revers au point de devenir largement négatif. Pourtant ce dernier vient récemment de corriger ses prévisions et estime que nous allons avoisiner les + 3.2% ». De quoi, rassurer les professionnels du tourisme.
Cette bonne nouvelle s’accompagne d’un climat favorable qui s’installe en France avec la confiance des ménages qui remonte. Emmanuel Lechypre ajoute : « les salaires viennent d’être augmentés dans tous les secteurs, l’inflation ralenti, la prime Macron se diffuse bien, les fonctionnaires obtiennent une revalorisation de 2.7%, c’est du jamais vu, ça représente des milliards… les cheminots réussissent à se faire augmenter de 17%, et les entreprises affichent des croissances entre 4 et 5%. Tous ces bons chiffres expliquent la remontée de la confiance des ménages ».
Avec la Chine qui ne se porte pas si mal, l’Allemagne qui voit elle aussi la confiance des ménages se redresser malgré son creux économique actuel et les US caracolant toujours en tête : la situation globale du monde se présente bien pour 2024.
S’ajoute à cela la prépondérance du besoin vital des vacances dans les sphères de la pyramide de Maslow. Emmanuel Lechypre insiste : « concernant la sociologie, les voyages apparaissent en bonne position dans la pyramide de Maslow. Ils se considèrent comme un besoin vital et non plus superflu ou accessoire. »
Comme les Français épargnent ‘’énormément’’ que les ‘’populations au bas de l’échelle sont protégées par notre modèle social’’, le budget des vacances se trouve sanctuarisé, explique notre économiste. Attention quand même à la situation de la classe moyenne bien plus exposée aux augmentations des charges contraintes.
C’est ce qui explique le recours des Français, de plus en plus nombreux, à avoir recours au paiement fractionné pour les voyages. Emmanuel Lechypre s’appuie sur la dernière étude Paypal qui l’atteste et précise que cette démarche se soutient par : « l’étude qui mesure les arbitrages au sein des foyers et fort heureusement pour le secteur : 46% des Français sont prêt à sacrifier des dépenses pour préserver le budget vacances ».
Alors tout est bien dans le meilleur des mondes ? : Oui, car l’inflation revient dans son lit, mais attention au décrochage de l’Europe par rapport aux États-Unis. Emmanuel Lechypre explique : « l’Amérique du Nord a tout pour elle : la matière grise, le marché des capitaux à demeure, une démographie dynamique, le dollar comme la monnaie du monde et l’indépendance énergétique. Par voie de conséquence ce pays innove en permanence alors que l’Europe s’évertue à se protéger par l’accumulation de règlements entraînant des réactions trop tardives, trop timides et trop complexes à réaliser. »
Reste une inconnue : celle de l’intelligence artificielle. Incarnera-t-elle la promesse d’une meilleure capacité à individualiser les attentes pour mieux répondre aux motivations des voyageurs ? Ou laissera-t-elle la machine prendre le pas sur l’humain ? l’avenir va y répondre.
En attendant, pour Emmanuel Lechypre nous vivons un période de bascule, mais dont la productivité sera le premier bénéfice : « les études nous laissent augurer un gain de 10 à 15% de productivité ce qui se traduira par 1 point de plus de croissance, ce serait une bénédiction eu égard à la baisse constante que notre PIB subit depuis des années. »
Notre économiste n’élude pas pour autant les défis à venir, en particulier celui de l’écologie : « comment faire en 10 ans ce qu’on n’a pas fait en 30 ans avec la même méthode ? »
Il s’attend pourtant à la baisse des taux ce qui devrait donner un peu d’air à notre économie et pour ce qui concerne la France, l’espoir d’une simplification des règles. L’annonce de Bruno Lemaire le laisse entendre depuis la décision de supprimer les formulaires Cerfa d’ici 2030. Rappelons que l’hexagone se crédite de 400 000 normes contre 50 000 en Allemagne !
Pour Emmanuel Lechypre cette simplification reste la dernière chance de la France pour le redressement des comptes publics : « si la France n’a plus les moyens d’augmenter les dépenses, n’est pas capable d’engager des mesures pour faire des économies, ne peut plus recourir à l’impôt ayant déjà le taux de prélèvement le plus élevé du monde, la dernière chance réside dans sa capacité à simplifier les règles pour donner plus de marge de manœuvre aux entreprises. »
Peut-être aussi un début de commencement de la perception de français conclu notre éditorialiste : « 7 français sur 10 pensent donner plus à l’état que ce qu’ils perçoivent alors que dans la réalité 6 français sur 10 reçoivent plus de l’état que ce qu’ils donnent ».
Le chemin semble long, mais l’espoir fait vivre.