La faillite de Primera Air et les difficultés de Norwegian illustrent la fragilité du modèle du low cost long-courrier…
La nouvelle a surpris tout le monde : quelques semaines après avoir annoncé le lancement en mai 2019 d'un nouveau vol entre Bruxelles et Newark, la compagnie aérienne Primera Air s'est déclarée en faillite le 1er octobre. La low cost basée au Danemark met fin à toutes ses opérations à compter d'aujourd'hui. Cette faillite soudaine illustre la fragilité du modèle low cost long-courrier, comme nous le décrivions dans le dossier paru dans notre numéro d'octobre et intitulé "low cost long-courrier, le match n'est pas gagné".
Principale difficulté pour les compagnies low cost long-courriers : parvenir à prendre des parts de marché aux compagnies régulières et rentabiliser leurs opérations tout en affichant des tarifs agressifs flirtant au plus juste avec le seuil de rentabilité. Or si les cours du pétrole s'envolent, l'équation devient encore plus insoluble pour les low cost indépendantes. Et c'est justement ce qui se passe aujourd'hui : coïncidence, l'annonce de Primera Air intervient alors que le baril a atteint hier son plus haut niveau depuis novembre 2014, à près de 75 $. On est loin du baril à 27 $ de février 2016…
De trop fortes charges et des retards de livraison
Les low costs long-courriers doivent également dimensionner finement leur flotte tout en maîtrisant leur endettement et le recours à la location d'appareils. Dans un e-mail envoyé aux salariés de Primera Air et largement relayé sur Internet, le directeur des opérations de Primera Air estime que la faillite de la compagnie est due à de trop fortes charges liées à des réparations sur des appareils atteints de corrosion et aux retards de livraison des nouveaux Airbus 321neo.
Anders Ludvigsson précise que la location d'appareils et les annulations de vols ont coûté trop cher à la compagnie. La taille de la flotte est aussi actuellement au cœur des préoccupations de Norwegian : la compagnie a annoncé en septembre la mise en vente de 90 Airbus 320neo qui devaient être livrés d'ici 2020. La low cost souhaite en effet réduire une dette qui atteignait en juin plus de 2 milliards d'euros !
Affronter les compagnies régulières
Les déboires des low cost long-courriers donnent aussi raison à ceux qui estiment que le long-courrier ne s'opère pas comme le moyen-courrier, le cheval de bataille traditionnel des low cost. Dernier exemple en date cet été avec le lancement calamiteux de Level, contraint de procéder à des annulations de vols pour "raisons opérationnels", suite à des problèmes techniques sur des appareils. En long-courrier, les low cost se retrouvent aussi à devoir affronter les compagnies régulières alors que tout l'intérêt du modèle low cost en moyen-courrier est de pouvoir développer des lignes de niche, souvent sans concurrence, au départ ou à destination d'aéroports secondaires.
Face à ces grands défis, le low cost long-courrier va-t-il tenir ? Le modèle répond clairement à une demande mais il doit encore trouver sa place. Le segment intéresse d'ailleurs toutes les grandes compagnies régulières, dont Lufthansa, IAG et Singapore Airlines, qui ont lancé leurs propres low cost long-courriers. Au moment où Primera Air disparaît, la bataille ne fait que commencer !